La coutume de déposer l’armement dans les tombes provenant des cultures
de Barbaricum de l’Europe Centrale est considérée comme un des éléments
empruntés à la culture de La Tène. Très souvent, à partir de panoplies
trouvées dans les tombes, on entreprend des analyses compliquées de
la fréquence des types respectifs d’armement. On compare minutieusement
les quota des guerriers avec un équipement complet, de ceux munis
seulement d’une épée ou d’une pointe de lance.
Il faut pourtant rappeler que le simple transfert des données fournies
par les cimetières dans le « monde des vivants » risque d’entraîner
de multiples erreurs.
Dans la présente communication, je voudrais mentionner plusieurs facteurs
qui sont à l’origine d’un décalage entre « lebende Kultur » et « entdeckte
Kultur ». Je me concentrerai sur des exemples de la culture de Przeworsk
datant de la période pré-romaine précoce, mais j’admets que la plupart
des considérations ici présentées restent valables aussi par rapport
aux autres cultures et aux autres cadres chronologiques.
La présence des objets militaires dans une tombe peut ne pas découler
forcément des croyances et des idées résultant d’un seul domaine de
la vie spirituelle propre à la culture analysée. Nous ne pouvons pas
exclure que la coutume, que nous observons dans les trouvailles archéologiques,
de déposer des armes dans les tombes, reflète en réalité plusieurs
croyances relatives aux différentes sphères de la vie spirituelle.
Il semble que la présence de l’armement dans les tombes peut témoigner
d’au moins deux éléments des croyances s’appuyant sur des motivations
distinctes :
1. Les armes constituaient une des marques du statut social et matériel
du défunt. L’armement mis dans la tombe appartenait vraisemblablement
au mort, mais sa composition pouvait ne pas être représentative par
rapport à la panoplie propre à une société donnée.
2. Les armes étaient liées au rite funéraire et elles pouvaient avoir
un rôle magique assurant la protection contre le pouvoir supposé du
défunt. Cette fonction est parfois attribuée aux objets aigus et tranchants
enfoncés dans la cavité funéraire. Les objets utilisés aux besoins
d’un tel rite n’appartenaient pas nécessairement au défunt..
Si l’on analyse le premier cas, il faut remarquer que la possibilité
de reconstruction des panoplies à partir des trouvailles de nécropoles
DÉPEND des facteurs suivants :
1. Le rang varié des catégories d’armes, dont seulement quelques-unes
pouvaient être traitées comme attribut de la position sociale qui
justifiait l’équipement de la tombe du guerrier.
2. Les principes de l’équipement funéraire propre aux membres particuliers
de la population d’une culture précise, en fonction du sexe, de l’âge,
du statut social, de la position dans le groupe guerrier, etc. Les
possibilités de la reconstruction des principes qui déterminaient
le rite funéraire dans l’antiquité sont très limitées.
1. Les coutumes locales de l’équipement funéraire qui sont limitées
à la population exploitant une nécropole donnée. La richesse des dons
funéraires dépendait probablement de la possibilité d’utilisation
du fer. Dans certaines nécropoles de la culture de Przeworsk, on constate
l’absence de pièces d’armement précises, par exemples des boucliers.
2. Une possibilité potentielle de l’emploi des armes fabriquées entièrement
en matières organiques.
3. La composition de l’équipement funéraire qui sert d’objet à l’analyse
des « combinaisons d’armes » est fortement influencée par le caractère
du rite funéraire. Pendant la destruction rituelle de l’équipement
du guerrier, certains menus objets comme rivets d’ umbos, des pièces
métalliques de fourreaux d’épées à un tranchant pouvaient être abandonnées
et rester dans l’ustrinum pendant l’incinération d’un autre défunt
et se retrouver ensuite dans l’inventaire d’une autre tombe.
Les trois premiers facteurs constituent un trait typique de la population
utilisant une nécropole précise et ce sont eux qui décident de la
forme de la « culture découverte » dont nous faisons connaissance.
Ils font aussi que des données résultant d’une étude de l’armement
d’une culture ne doivent pas toujours comparées sans restriction et
considérées comme repère par rapport au matériel d’une autre unité
culturelle, dont la population s’appuyait sur d’autres principes,
entre autres ceux qui concernaient les rites funéraires et les attributs
relatifs à la position sociale du guerrier. On peut supposer que la
fonction des éléments considérés ci-dessus n’était pas fixe, mais
qu’elle changeait avec le temps, par exemple à cause de l’extension
de la technologie de réduction de minerais de fer.
Toute définition du pourcentage des « formations de guerriers » particulières
à partir de la composition des tombes contenant des armes est vouée
à des déformations sérieuses résultant des principes liés au rite
funéraire.